Ouvrir des espaces de délibération sur l’alimentation, pouvoir débattre des chemins à emprunter pour améliorer un accès digne à une alimentation, oser exprimer des colères liées à la faim, à la bouffe, à son prix, à sa qualité, à la difficulté d’y accéder, affirmer l’envie de se nourrir ensemble dans des lieux qui créent du commun et de l’humanité. Les assemblées citoyennes servent à tout cela. Si elles ne suffisent pas à elles-seules à faire advenir un droit effectif à l’alimentation, elles contribuent à mettre à l’agenda ce sujet, à en faire un objet politique et à faire naître un plaidoyer populaire. Le 12 octobre à Grenoble, Aequitaz et la Ville de Grenoble, avec l’appui de nombreux acteurs du territoire, ont co-organisé la première assemblée citoyenne de l’alimentation. 250 personnes étaient présentes.
L’accès à des denrées : une condition insuffisante pour bien manger
Dans les mois qui ont précédé l’Assemblée, le groupe d’enquête initié par Aequitaz avait déjà pointé ce sujet. Pour des personnes qui vivent seules, qui n’ont pas de « chez eux » ou dont les conditions de logement ne leur permettent pas de cuisiner, il est important que des lieux collectifs accueillants, inclusifs, accessibles et proposant de la nourriture de bonne qualité et selon nos goûts existent et puissent avoir les moyens de fonctionner… « Nous voulons des lieux où on nous dit « Bonjour ! » avec un sourire, chaleureux sans être trop luxueux, avec de grandes tables mais aussi des plus petites pour manger « en famille » ou entre ami.e.s. » nous a dit Charlotte. « On peut éventuellement donner un coup de main, avec plusieurs tarifs et sans que nous nous sentions coupables de ne pas pouvoir mettre plus… » a ajouté Karim. Le 12 octobre, le sujet est revenu : dans de nombreux quartiers « le plus simple c’est d’aller à Carrefour ».
Dans le haut-parleur des injustices alimentaires, d’autres voix se sont également exprimées sur le choix d’accéder à des aliments « que j’aime« , « qui me rappellent mon enfance« , ou « dont j’adore le goût« . Manger dignement c’est avoir le choix. Or, « il est difficile d’être libre de ses choix avec des freins financiers mais aussi avec la publicité qui nous maintient dans des addictions au sucre par exemple« .
Mener collectivement un plaidoyer pour le droit à l’alimentation
Dans le champ des possibles, petit marché des alternatives alimentaires et dans les cercles de discussions, nous avons créé les prémices d’alliances inédites entre citoyen.nes, acteur.rices de l’alimentation et de la solidarité, paysan.nes et collectivités pour faire reculer les injustices alimentaires. Pour être tou.te.s ensemble dans le même bateau, l’alliance avec les paysans a été citée comme indispensable. Aller vers une sécurité sociale de l’alimentation pourrait « nous rendre toutes et tous fiers de mener ensemble une aventure collective« .
En 2025, nous voulons continuer à faire vivre cette démocratie alimentaire, à nourrir activement, collectivement, les projets visant à garantir un droit nouveau, celui pour chacun.e d’avoir accès à une alimentation choisie et de qualité. Nous pensons que l’alimentation ne peut plus être la variable d’ajustement des personnes vivant la précarité – au risque de leur propre santé et ce celle de la planète – et que chacun soit renvoyer à sa responsabilité individuelle – celle de consommateur – pour changer la donne concernant la qualité de notre alimentation et les revenus de nos paysan.ne.s. Nous avons besoin qu’existent et se développent des lieux collectifs où l’on réfléchisse, on propose, on produise, on transforme, on cuisine et on mange ensemble. La démocratie alimentaire est ce chemin qui donne davantage de pouvoir aux citoyen.nes, et notamment à celles et ceux qui aujourd’hui vivent dans la pauvreté et la précarité.